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Notre vision du futur de Venise

Venezia da Vivere et l’association Piazza San Marco ont lancé en Juin 2020 #RiscrivereilFuturo di Venezia, #Réécrire le futur de Venise, un débat ouvert pour la renaissance de la ville, considérant que son avenir dépendra des choix que nous faisons aujourd’hui.

Nous nous nous sommes prétés au jeu et avons imaginé à notre tour, comment nous verrions le futur de Venise si nous avions toutes les cartes en main pour agir. 

1/ Comment imaginez-vous Venise dans le futur ?

Je fais partie des personnes qui pensent que Venise a plus d’un tour dans son sac et que loin d’être une ville en déclin, elle renaîtra de l’idée même qui l’a forgée : l’alliance du génie humain et de la créativité.

Venise est plus qu’une ville d’une incroyable beauté, et l’étude de son histoire démontre que pendant des siècles, elle a mis au centre de ses préoccupations les échanges humains, l’alliance avec la Nature, la notion de Bien commun, le tout guidé par une organisation et un savoir-faire technologique avant-gardiste.

Ce en quoi je la trouve extrêmement moderne car fidèle à des thèmes fondateurs qui seront nos défis de demain.

Ce serait une erreur de la juger sur sa seule évolution overtouristique des 50 dernières années, car à l’échelle de son histoire, Venise a démontré son incroyable potentiel, Venise est un concept en soi.

Venise a toujours su faire des contraintes une force, sinon comment imaginer que des hommes aient eu la folle idée de transformer ces terres marécageuses en la plus belle des cités, qu’ils aient détourné deux bras de fleuve pour lui éviter de s’enliser, construit un centre d’effervescence international plantant pilier après pilier, et centre devenu par ailleurs le foyer principal d’activités en Europe durant des siècles.

Aujourd’hui nous sommes à un tournant, la révolution durable a déjà commencé et nous sommes face à un bouleversement sans précédent qui va générer de l’instabilité mais aussi et surtout créer de grandes opportunités à qui saura faire preuve de créativité.

Plus la technologie avance, plus les hommes iront rechercher le contact direct avec d’autres hommes. Or Venise est certainement la ville la plus humaine que j’ai pu rencontrer. Dans son mode de vie tout d’abord, dans son rapport au temps et dans sa conception intrinsèque, elle est une « ville à mesure d’homme » comme le répètent à l’infini les Vénitiens. Elle repose sur un modèle que demain beaucoup de villes pourraient envier.

Mais cette nécessité de préserver la dimension humaine dans le futur de Venise n’ira pas sans un changement fondamental de la contrainte actuelle que représente le tourisme.

Le touriste de demain à Venise se devra avant tout d’être un voyageur-acteur du changement car il a aussi en lui de nombreuses clefs pour participer au renouveau de cette fabuleuse cité.

Ces dernières années ont montré combien la massification des flux de personnes déferlant sur moins de 7 km2, par groupes de plus de 50 personnes pour quelques heures seulement, étaient capables d’annihiler et de tuer toute la richesse de la dimension humaine, citoyenne et amicale de Venise.

Et si l’épidémie de Covid-19 a permis aux habitants de retrouver un instant l’intimité de leur ville, il n’en reste pas moins que nous sommes loin de la solution dans la mesure où la situation est dramatique pour la plupart des activités commerciales et artisanales.

Si Venise s’est vidée de son tourisme envahissant, elle a néanmoins un besoin viscéral pour renaître, de notre présence à nous les Hommes qui l’habitons ou qui la visitons.

Certes, il n’est pas facile de revenir en arrière du jour au lendemain sur la mécanique de fonctionnement d’une ville focalisée depuis des dizaines d’années sur une culture mono-touristique, mais ne peut-on imaginer donner demain à ce voyageur un rôle différent, un rôle plus actif et constructif que celui qu’il occupe actuellement ?

Du statut de masse anonyme de spectateurs déferlant, tels les barbares du Vème siècle poussant les futurs Vénitiens dans leurs retranchements, on pourrait passer au statut de voyageur-acteur.

C’est ce pari que nous avons fait en créant l’association Les Ailes de Venise. Nous souhaitions permettre au futur visiteur de Venise, sur place ou depuis l’étranger, de s’associer à la vie citoyenne de la ville en collaborant aux projets d’associations vénitiennes.

Car si cette vie citoyenne est indispensable à la bonne santé de la ville, elle l’est également à celui qui y vient pour quelques jours !

La Venise du futur pour nous les amateurs inconditionnels et inlassables, c’est une Venise peuplée de résidents actifs jeunes et moins jeunes, respectueuse de ses traditions avec ses petits commerces de bouche et ses artisans si propices à la rencontre humaine suscitant toujours l’intérêt du monde entier et pôle d’échanges internationaux mais avec une place centrale pour une jeunesse et une classe moyenne qui aurait choisi de la célébrer en s’y installant pour y vivre et travailler.

L’avancée des technologies a montré que les activités professionnelles pouvaient presque toutes continuer pendant le confinement à domicile, alors pourquoi ne permettrait-elle pas depuis Venise de se connecter au monde entier ? Pourquoi au sortir des universités prestigieuses de Ca’Foscari ou de Padoue, ne pourrait-on pas s’installer pour travailler à Venise ?

Tous les jours pour aller travailler, les Vénitiens emprunteraient virtuellement le pont de la Liberté et sans se déplacer, dans un cadre maritime proches de la nature, inspirant et propice à la créativité, ils façonneraient le monde de demain.

Le voyageur, quant à lui, aura démontré un réel souhait de découvrir la ville en y réservant à l’avance sa place, et ne se retrouvant plus mis en situation de troupeau grégaire, pourrait d’autant mieux apprécier et vivre la cité aux côtés de ses citoyens.

 

2/ Que peuvent faire les politiques et les citoyens pour une renaissance de Venise

Cosa possono fare la politica e i cittadini per una rinascita di Venezia?

Respectant la tradition vénitienne, qui faisait qu’à l’époque être Doge ou faire partie du conseil des 10 était une véritable contrainte impliquant dévotion à la ville, les politiciens quels que soient leurs orientations devraient privilégier le Bien Commun. Une majorité des actions seraient alors orientées sur la protection et la sauvegarde du joyau humain et environnemental que représente Venise et sa fragile Lagune.

 

Lutter contre le dépeuplement et privilégier le logement vénitien en favorisant fiscalement ceux qui louent aux résidents, en mettant fin à la prédation sur les hébergements touristiques, en posant des limites à la spéculation immobilière via un nombre limité de jours de location aux touristes, en autorisant des dérogations non aux agences immobilières anonymes détentrices de dizaines d’appartements mais aux familles qui habitent le centre historique de Venise et qui louent un appartement ou une chambre pour arrondir les fins de mois (via de nouvelles plateformes comme celle du projet Fairbnb par exemple).

Préserver les commerces de proximité en en rachetant certains, dans des opérations du type « Vital Quartier », expérience concluante menée par exemple à Paris et protéger l’artisanat vénitien devenu si rare, en lui donnant un écho encore plus international via l’utilisation de plateformes orientées vers une clientèle amatrice et ciblée à travers l’exploitation du big data, sont des voies à explorer.

Interdire les visites guidées de plus de quinze personnes aiderait à respecter la morphologie si particulière de la ville, et modifier l’affectation de la taxe de séjour afin qu’elle soit une ressource favorisant les mobilités douces et les modes de transport écologiques évitant le moto ondoso sur les canaux.

Venise appelée à l’époque la Reine des mers doit conserver ce statut et pourrait devenir le modèle d’une ville à mobilité douce sur l’eau. Privilégier les traghettis, les vaporettos électriques, laisser une place plus importante à la Voga, aux embarcations à rames et permettre certains jours la découverte du Canal Grande sur une eau apaisée attiraient des visiteurs d’une autre nature qui rechercheraient qualité et douceur de vivre.

 

3/ Pourrais-tu développer ue idée spécifique pour l’un de ces sujets : Environnement, Résidentialité, Travail , Sécurité et Tourisme ?

 

Avec les Ailes de Venise, c’est le thème du tourisme qui est notre prédilection et nous sommes avant tout une association qui propose un nouveau concept à savoir l’implication directe et surtout concrète du voyageur dans le futur de la ville.

A la manière dont les entreprises se sont attachées à développer la RSE (Responsabilité Sociale de l’Entreprise) depuis 2001 au travers du livre vert de l’UE qui décrit l’ensemble des pratiques mises en place par les entreprises dans le but de respecter les principes du développement durable (social, environnemental et économique), nous développerions la notion de RST ( Responsabilité Sociétale du Touriste) qui pourrait devenir vite une RSV (Responsabilité Sociale du Voyageur), la terminologie touriste ayant pris ces dernières années un caractère péjoratif.

Le voyageur a en effet une responsabilité sociale ; cela signifie aller au-delà de sa condition d’habitant temporaire d’une ville pour s’investir un peu plus dans le capital humain, environnemental et sociétal qui composent son nouveau lieu de visite.

Les ailes de Venise proposent de travailler sur des projets d’associations vénitiennes allant de la rénovation d’un bateau historique Il Nuovo Trionfo, à la récolte de déchets sur les plages avec les jeunes de Venice Calls, à l’entretien des jardins Wigwam Giardini Storici, à l’enlèvement des graffitis sur les murs Masegni e Nizioleti.

Les dons récoltés sont reconvertis en matériel acheté sur place à Venise (encourageant ainsi les commerces de proximités) que nous offrons aux associations pour leur permettre de mener à bien leur projet. Nous recréons ainsi du lien et réanimons une collaboration que les conséquences de l’overtourisme avaient de fait dégradé.

Pourquoi en effet ne pas corréler son voyage à la nécessité d’être un acteur positif pour la ville et ses résidents ?

Etant donné la tendance actuelle de recherche par le touriste d’une « expérience authentique et d’une proximité avec les habitants », j’ai bon espoir que ces volontés se croisent pour aboutir à un équilibre et une harmonie.

Encore faudrait-il qu’à Venise, le nombre de ces habitants «si convoités » aille en grandissant dans le centre historique…

 

 

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